SECTION SCIENCES PHYSIQUES
Extrait de : “Le Temps, Oeuvre collégiale“, DRC.
L’avènement de la théorie de la relativité générale a permis l’émergence d’une nouvelle science : la cosmologie. L’univers peut être alors considéré comme un tout que l’on peut traiter à l’aide des équations dont Einstein a donné le formalisme.
L’horloge universelle
Comme cela a déjà été mentionné, de grands théoriciens se sont emparés des équations de la relativité dans le but d’en trouver des solutions compatibles avec les réalités de l’observation.
Combinés avec l’observation astrophysique, qui indique sans ambiguïté que les galaxies qui peuplent l’univers sont en mouvement dans un espace-temps qui s’étend dans toutes les directions, les calculs théoriques assignent à l’univers un âge d’environ 13,7 milliards d’années. Ce phénomène d’expansion de l’univers – connu sous le nom de décalage vers le rouge (la lumière qui s’éloigne d’un observateur se décale vers la longueur d’onde du rouge) – s’accélère sous l’effet d’une force dont l’origine est encore mal définie. Le décalage vers le rouge est une formidable machine à remonter le temps.
Pouvoir assigner un âge à l’univers, dans le cadre strict des théories cosmologiques, c’est aussi dire qu’il a eu un commencement. Tout ce que nous voyons aujourd’hui au travers des télescopes – le Soleil et les planètes du système solaire, l’immensité des étoiles et des galaxies – n’a pas toujours existé.
Le temps cosmique, que l’on peut assimiler au temps cosmique universel, en combinaison avec l’espace, est donc la trame spatio-temporelle dans laquelle se déroule la formation de tout ce que nous observons maintenant : les particules atomiques, les atomes, les molécules, les galaxies, les grandes nébuleuses gazeuses, les soleils et les planètes. Tout cela a pris naissance depuis que l’horloge universelle s’est mise en route il y a de cela 13,7 milliards d’années.
Temps et évolution de l’univers
- Les faits expérimentaux de la cosmologie
Plusieurs faits expérimentaux viennent à l’appui d’une théorie qui postule que l’univers n’a pas toujours existé, mais qu’il a eu un commencement dans le temps et dans l’espace :
– Les galaxies sont animées d’un mouvement d’ensemble qui les fait s’éloigner les unes des autres, et ce d’autant plus rapidement qu’elles sont plus lointaines ; ce mouvement de fuite – récession – a pour effet un décalage vers le rouge de leur spectre (phénomène propre aux ondes lumineuses), nommé redshift chez les Anglo-Saxons. Ce mouvement d’ensemble s’explique si c’est l’espace-temps lui-même qui est en expansion. Pour certains cosmologistes, il suffit d’inverser, par la pensée, ce mouvement d’expansion et d’imaginer que tout l’univers était, à l’origine, concentré à l’infini. C’est la théorie de l’atome primitif de l’abbé Lemaître.
– En 1965, deux radioastronomes, Penzias et Wilson, des laboratoires Bell aux États-Unis, mirent en évidence un rayonnement électromagnétique diffus de très faible intensité qui baigne l’ensemble de l’univers. La découverte de ce rayonnement, dont l’intensité se situe entre l’infrarouge et les ondes radio, était, pour les cosmologistes, la signature d’un phénomène qui s’était déroulé quinze milliards d’années plus tôt. Ce que Trinh Xuan Thuan appelle les « cendres » du feu primordial, ou que les physiciens nomment le rayonnement fossile. Ce fut une découverte de la plus haute importance pour la cosmologie.
– Avec l’apport prodigieux de la radioastronomie, les astronomes s’étaient dotés d’instruments leur permettant de savoir de quels matériaux se compose l’univers. À partir de l’abondante présence des éléments comme l’hydrogène et le deutérium, et des lois de la physique, seule une théorie comme celle du big-bang était à même d’expliquer leur origine astrophysique.
C’est pour cela que la théorie du big-bang a le vent en poupe et qu’elle est aujourd’hui la référence en matière de cosmogenèse et de nucléosynthèse.
- La cosmogenèse
La création de l’univers est un phénomène incroyable, et pour tout dire proprement inimaginable. Inimaginable, en effet, de penser qu’au début,
[…] il n’y avait rien. Ni temps, ni espace, ni même vide… puisqu’il n’y avait même pas d’espace pour recevoir le vide. Puis, brusquement, de ce rien jaillit un univers plus infime que le plus infime grain de poussière, mais contenant en germe tout ce qui va exister.
Aucune loi physique ne permet encore de comprendre es processus qui sont à l’oeuvre dans cet infime grain de poussière. « Les dimensions de cet espace chaotique sont enchevêtrées et déchirées par des discontinuités. » Les notions habituelles de temps n’ont pas cours : ici et là, ou maintenant ou après, n’ont aucune signification. La matière et les forces qui structurent notre univers actuellement n’existent tout simplement pas. L’univers n’est rien d’autre que de l’énergie pure.
Mais dès l’instant primordial où le processus de création s’est enclenché, alors ce minuscule univers commence son expansion et perd de sa chaleur. Dans ces limites encore embryonnaires, l’espace se démêle, l’horloge cosmique se met en marche, et le temps s’écoule du passé vers le futur. À ce moment, les lois de la physique deviennent opérationnelles et permettent de proposer un scénario plausible sur les événements qui vont alors se dérouler.
En augmentant sa taille, l’univers perd suffisamment de sa chaleur pour que la force de gravitation arrive en scène et freine son expansion. Les particules, au sens de la physique, entrent alors en jeu : par des chocs d’une violence inouïe, elles fusionnent, s’annihilent et disparaissent dans une débauche d’énergie. Puis, sous l’effet de phénomènes physiques qui inversent le sens de la force de gravitation – dirigée jusque-là vers l’intérieur, la gravitation se tord vers l’extérieur – celle-ci précipite le mouvement d’expansion de l’univers. Ce phénomène d’inflation gonfle l’univers à une allure vertigineuse, et ses proportions subatomiques atteignent celles d’un pamplemousse. De nouvelles particules émergent, se désintègrent, donnant naissance à d’autres particules avant de disparaître : les constituants des atomes. Puis, en moins d’une seconde, l’univers à acquis les dimensions du système solaire. Les conditions qui y règnent sont enfin propices à la création de la matière et de l’énergie telles que nous les connaissons ; cette matière et cette énergie sont les constituants des étoiles et des galaxies.
Mais il va falloir un temps considérable avant d’en arriver là. Alors que le rythme de l’expansion ralentit, l’univers perd progressivement de sa chaleur en grossissant.
La nucléosynthèse primordiale – l’assemblage de particules de moindre énergie en atomes d’hydrogène – s’amorce alors. Au fur et à mesure de l’écoulement du temps, la lumière aveuglante des origines va faiblir petit à petit et se diluer dans l’expansion de l’univers. Tandis que l’opacité de l’univers se résorbe, les télescopes vont enfin pouvoir capter la lumière des étoiles et des galaxies, dont la matière première est constituée des premiers atomes d’hydrogène et d’hélium.