« En tant qu’auteur de ce Manifeste, et avant que vous en preniez connaissance, je souhaiterais me présenter. Par le passé, j’ai été connu sous le nom de Christian Rosenkreutz, fondateur mythique de l’Ordre de la Rose-Croix, société secrète dont les historiens de l’ésotérisme situent l’origine au début du XVIIe siècle, mais dont la Tradition est beaucoup plus ancienne, puisqu’elle remonte aux Écoles de mystères de l’Égypte antique.
Dans la Fama Fraternitatis, publiée en 1614, il est expliqué en détail pourquoi et comment, après avoir parcouru le monde à la recherche des plus grands érudits de l’époque, j’en suis venu à créer l’Ordre de la Rose-Croix. Formé à l’origine de quelques membres versés dans l’hermétisme, l’alchimie et la kabbale, il s’est développé par la suite et a perduré jusqu’à nos jours. Étant son fondateur, j’ai continué à veiller sur sa destinée, tantôt depuis le plan spirituel, tantôt en étant incarné ici-bas.
Un deuxième Manifeste fut publié l’année suivante, en 1615 : la Confessio Fraternitatis. Sans entrer dans les détails, je dirai qu’elle constitue le prolongement de la Fama et la complète en donnant des précisions sur les règles et le fonctionnement de la Fraternité rosicrucienne, tels que je les avais établis. On y trouve également des révélations sur le Liber Mundi (le Livre du Monde), sur le but véritable de l’alchimie, et sur la Science que les Rose-Croix possèdent pour mener à bien la régénération spirituelle de l’humanité.
Un troisième Manifeste, publié en 1616, vint s’ajouter au deux précédents. Dans un style très différent, il relate un rêve que je fis à l’époque où j’ai fondé l’Ordre de la Rose-Croix. Durant ce rêve, je me suis vu mener un périple initiatique de sept jours, à l’issue duquel je fus convié au mariage d’un Roi et d’une Reine, célébré dans un mystérieux château. Ce rêve allégorique, jalonné de références alchimiques, a fait l’objet de nombreuses interprétations, certaines éloquentes et inspirantes, d’autres fantaisistes et même absurdes.
Dans ma vie présente, je suis né le 13 décembre 1982, à Paris, cette Ville de Lumière où les Rose-Croix se sont fait connaître en 1623 par des affiches placardées ici et là dans les rues. Permettez-moi de vous en rappeler les termes :
« Nous, députés du Collège principal de la Rose-Croix, faisons séjour visible et invisible en cette ville par la Grâce du Très-Haut, vers Lequel se tourne le cœur des Justes. Nous montrons et enseignons à parler, sans livres ni marques, toutes sortes de langues des pays où nous voulons être pour tirer les hommes, nos semblables, d’erreur de mort.
S’il prend envie à quelqu’un de nous voir par curiosité seulement, il ne communiquera jamais avec nous, mais si la volonté le porte réellement à s’inscrire sur le registre de notre Confraternité, nous, qui jugeons des pensées, lui ferons voir la vérité de nos pro- messes ; tellement que nous ne mettons point le lieu de notre demeure en cette Cité, puisque les pensées jointes à la volonté réelle du lecteur seront capables de nous faire connaître à lui, et lui à nous. »
Souhaitant garder l’anonymat, je ne vous dirai ni où je demeure, ni quelles sont mes activités, ni quoi que ce soit qui puisse vous mener jusqu’à moi. Conformément aux règles que mes frères et moi-même nous étions fixées jadis, je me dois de rester « invisible ». Peut-être nous rencontrerons-nous un jour, mais dans ce cas, c’est moi qui viendrai à vous. Sachez néanmoins que mon attachement à la Rose-Croix demeure absolu et qu’elle est et restera ma voie spirituelle, jusqu’à ma réintégration finale et définitive dans l’Âme universelle.
Croyez-le ou non : je n’aurais jamais pris ni le temps ni la peine d’écrire ces quelques pages si je n’avais éprouvé la nécessité impérieuse de le faire, suite à un rêve que j’ai fait dans la nuit du 20 mars 2015, jour du printemps, et dont la nature et le contenu m’incitèrent à en faire le récit. Jugez plutôt : après m’être mis au lit, non sans avoir pris le temps de méditer sur la journée que je venais de passer et qui, me semblait-il, avait été constructive, je m’endormis. Au plus profond de mon sommeil, je me suis vu soudainement dans un œuf en verre d’environ trois mètres de hauteur et de quelques centimètres d’épaisseur. Parfaitement translucide et symétrique, il était d’une grande beauté et d’une parfaite régularité. Je me tenais debout en son centre, comme en lévitation, et me sentais particulièrement bien.
L’étonnement passé, j’observai l’œuf avec attention. Je vis alors, dans la partie supérieure, gravés dans le verre, à égale distance sur l’ensemble de son pourtour, les symboles du sel, du mercure et du soufre […]. »