« Comme nous allons le voir, le Nombre d’Or représente une proportion. C’est pourquoi Léonard de Vinci nommait cette proportion section dorée, et Luca Paccioli divine proportion.
Dans l’Antiquité grecque, le Nombre d’or avait une toute autre signification. Les Grecs avaient un calendrier lunaire basé sur une lunaison de 29 jours 1/2. Pour des raisons pratiques, ils avaient besoin de faire coïncider le cycle lunaire et le cycle solaire. L’année grecque comportait 12 et parfois 13 lunaisons.
Au Ve siècle avant J.-C., l’astronome grec Méton détermina le cycle luni-solaire au bout duquel il y avait, à nouveau, coïncidence entre la position de la Lune et celle du Soleil. Ce cycle de 19 ans, soit 235 lunaisons, fut nommé cycle de Méton ou ennéadécaétéride, et adopté en 433 avant J.-C. par la Grèce. Méton avait installé sur la place publique d’Athènes un instrument appelé héliotrope, sorte de gnomon, pour observer les solstices et calculer son calendrier. Cette découverte suscita une telle admiration que les Athéniens firent graver la durée du cycle en lettres d’or sur les colonnes d’un temple de Minerve. C’est ainsi que le nom de ce cycle astronomique luni-solaire de 19 ans est rentré dans l’histoire sous le nom de Nombre d’or.
Le calendrier luni-solaire était utilisé par les Grecs, les Juifs, mais aussi par les Indiens, les Chinois et les Mongols. De nos jours, il est encore utilisé par les Israélites et les Musulmans. Dans la religion catholique, le jour de Pâques est encore lié au cycle lunaire, puisque Pâques est une fête mobile qui tombe le premier dimanche qui suit la première pleine lune après l’équinoxe de printemps.
Le Nombre d’or doit être abordé maintenant, car cette proportion va nous permettre de construire le pentagone. Nous allons utiliser quatre approches, la première étant la plus rationnelle, mais la moins symbolique : c’est celle que l’on trouve dans le livre Éléments de géométrie d’Euclide, le mathématicien grec du IIIe siècle avant J.-C. Les deux suivantes ne prétendent pas à la rigueur mathématique, mais doivent être comprises comme une démonstration « philosophico-mathématique ». L’une concerne la recherche du retour à l’Unité par l’utilisation de la moyenne géométrique, par analogie avec l’utilisation de la moyenne arithmétique pour la génération de la gamme diatonique pythagoricienne abordée au chapitre IX. L’autre est l’expression de la perpétuation à partir d’un élément mâle et d’un élément femelle. Dans la dernière partie, nous reparlerons du mathématicien du Moyen Âge Léonard de Pise, dit Fibonacci.
Cette série de nombres est constituée de la suite :
1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, 144…
Ces quatre approches sont développées après le résumé, en fin de chapitre.
En résumé, les quatre approches envisagées nous conduisent à découvrir le Nombre d’or Φ sous la forme d’une proportion particulière ayant un rapport avec la vie et le Cinq qui lui est associé. C’est un nombre irrationnel dont la valeur numérique est :
Dans le chapitre suivant, nous allons révéler un peu plus le Nombre d’or et nous intéresser en particulier à quelques-unes de ses propriétés.
PREMIÈRE APPROCHE : UN PROBLÈME DES ÉLÉMENTS D’EUCLIDE
Dans le livre Éléments de géométrie que nous a laissé Euclide se trouve un problème connu sous le nom de partage d’un segment de droite en moyenne et extrême raison. C’est un problème de proportions. En voici l’énoncé :
Trouver sur un segment de droite AB un point M tel que le rapport entre la plus grande partie (a) et la plus petite (b) soit égal au rapport entre le tout (a + b) et la plus grande (a).
Voici comment trouver le point M sur AB :
Sur le segment de droite AB, en B, on élève la perpendiculaire BC à AB. On trace le cercle de diamètre = AB tangent en B et de centre O placé sur la perpendiculaire BC. Du point A, on trace le segment de droite AO passant par le centre O. Ce segment coupe le cercle en M’. On reporte la longueur AM’ sur le segment de droite AB, soit AM. Le point M est le point recherché.
Nous expliciterons cette construction au chapitre XII.
On peut calculer la valeur du rapport a/b, soit x.
On divise les deux membres par b2, ce qui donne :
Si l’on remplace a/b par x, on obtient x2 – x – 1 = 0, équation du second degré dont la solution positive est :
Φ (prononcé phi) est la lettre grecque qui désigne le Nombre d’or, peut-être en souvenir du sculpteur grec Phidias, depuis le début du XXe siècle. Le rapport du partage en moyenne et extrême raison est donc égal au Nombre d’or Φ
La valeur de Φ avec 9 décimales vaut 1,618033989. À cause de Ö5, le Nombre d’or Φ est un nombre irrationnel dont le nombre de décimales est sans fin (voir le chapitre VI et la diagonale du carré).
Remarque : La solution d’une équation du second degré est donnée par la formule suivante, soit l’équation :
Les deux solutions sont :
Voici la démonstration géométrique d’Euclide avec la figure ci-après :
Soit le segment de droite AB à partager en moyenne et extrême raison. Sur le segment de droite AB, on trace le carré ABCD de côté égal à AB. Du milieu O du côté AD, on trace l’arc de cercle de rayon OB qui coupe le prolongement de DA en E. On construit le carré AMFE. On prolonge le côté FM pour qu’il coupe le côté du carré ABCD en C’.
Le carré AMFE et le rectangle MBCC’ ont deux surfaces égales.
Démonstration : Si AB = AD = 1, AO = 1/2, le rayon du cercle de centre O vaut, d’après le théorème de Pythagore appliqué au triangle rectangle OAB :
le carré AMFE a pour surface AE2, c’est-à-dire :
donc le rectangle MBCC’ a pour surface :
Le carré AMFE et le rectangle MBCC’ ont bien leurs surfaces égales, soit :
AM2 = AB × MB
En multipliant les deux membres par 1/(AMxMB) on obtient :
Le point M partage bien le segment AB en moyenne et extrême raison.
Le rapport de cette proportion est égal au Nombre d’or Φ = 1,618…
DEUXIÈME APPROCHE : LE RETOUR À L’UNITÉ PAR LA MULTIPLICATION
Nous avons vu au chapitre précédent que pour les pythagoriciens, l’expression de l’harmonie coïncide avec la recherche de l’Unité. La recherche de cette unité par la moyenne arithmétique, qui procède par addition, les a conduits à la construction de la gamme diatonique pythagoricienne.
La vie se développant par multiplication, que se passe-t-il si l’on utilise la moyenne proportionnelle qui procède par multiplication, pour rechercher l’Unité ?
La moyenne proportionnelle entre trois termes s’écrit sous la forme :
Comme pour la gamme pythagoricienne, X est le terme moyen recherché, A = 1 et B = 1 – X, les termes extrêmes.
On en déduit :
X2 = A × B ou X2 + X – 1 = 0
Comme pour la corde vibrante où la fréquence du son est l’inverse de la longueur de la corde, la vie doit s’exprimer par l’inverse du terme moyen X, soit :
L’équation précédente devient :
Nous obtenons encore une équation du second degré, dont la solution positive est :
La recherche de l’Unité par la moyenne proportionnelle, associée à la multiplication et à la vie, conduit au Nombre d’or.
TROISIÈME APPROCHE : LA PERPÉTUATION
Pour que la vie se perpétue et donne un descendant, il faut, suivant la loi du triangle, unir l’élément mâle et l’élément femelle.
Cette nécessité montre que l’élément mâle et l’élément femelle, donc l’homme et la femme, ne sont pas égaux mais complémentaires, et forment à eux deux un tout. C’est par leur union que la vie se multiplie et se perpétue, suivant une loi universelle que les mystiques considèrent comme divine.
Dans cette optique, l’union du couple n’est pas un simple besoin de reproduction ou de désir, mais un acte de nature divine qui transcende l’union. Nous sommes loin des conceptions généralement admises actuellement, que ce soit pour la reproduction ou pour les relations des couples.
Voici comment exprimer la perpétuation :
Soit M l’élément mâle et F l’élément femelle.
– Le couple est représenté par l’addition : M + F = 1
– Le descendant est représenté par la multiplication :
On constate que l’élément féminin F est l’inverse de l’élément masculin, ce qui n’est pas surprenant, puisqu’ils ne sont pas égaux mais complémentaires. Pour marquer cette complémentarité, si M est considéré représenter l’actif et le positif, et F le passif et le négatif, on affecte à F une valeur négative :
Si l’on remplace F dans le couple par cette valeur, on obtient :
Nous avons toujours la même équation du second degré, dont la solution positive est :
résultat en relation avec la perpétuation et la vie.
LA SÉRIE DE FIBONACCI
Dans son Liber abbaci (Livre de l’abaque), Fibonacci pose le problème suivant : Combien de couples de lapins peuvent être engendrés par une paire unique en un an, si chaque mois, chaque paire produit une autre paire qui devient productive à son tour à partir du troisième mois ?
Ce problème n’est pas très réaliste. Il est sans doute un moyen d’introduire une série de nombres qui aujourd’hui a rendu son auteur célèbre.
La description suivante donne la production des couples. Elle est limitée à sept mois. Le premier couple est désigné par A, ses descendants par B. Les descendants de B sont désignés par C, etc. Chaque couple produit est affecté d’un indice : par exemple, B1 est le premier couple de A, B2 le deuxième couple de A, etc.
Mois 1 : 1 couple = A.
Mois 2 : 1 couple = A.
Mois 3 : 2 couples = A et B1 issu de A.
Mois 4 : 3 couples = A, B1 et B2 issus de A.
Mois 5 : 5 couples = A, B1, B2 et B3 issus de A et C1 issu de B1.
Mois 6 : 8 couples = A, B1, B2, B3, B4 issus de A, C1, C2 issus de B1 et D1 issu de B2.
Mois 7 : 13 couples = A, B1, B2, B3, B4, B5 issus de A, C1, C2, C3 issus de B1, D1, D2 issus de B2 et E1 issu de B3.
Voici un tableau qui reprend ces résultats sur 8 mois. Quand un couple devient productif, il est entouré par un pentagone.
Le total des couples pour les huit mois consécutifs donne la suite :
1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21
On constate que, sauf pour les deux premiers mois, le nombre de couples pour un mois est égal à la somme des nombres des deux mois précédents.
2 = 1 + 1,
3 = 1 + 2,
5 = 2 + 3, etc.
Cette suite de nombres est connue sous le nom de série de Fibonacci. En voici un développement plus complet :
1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, 144, 233, 377, 610, 987…
On vérifie que très rapidement, le rapport entre un des termes et le précédent vaut 1,618, soit Φ.
Par exemple :
13 /12 = 233 /144 = 1,61805
14 /13 = 377/ 233 = 1,618026
Ensuite, on obtient 1,61803735, puis 1,618032787, puis 1,618034448, etc.
Les valeurs obtenues encadrent alternativement la valeur de Φ, une fois en dessus, une fois au-dessous. Plus on avance dans la suite, plus la valeur du rapport se rapproche de
Φ = 1,618033989
Là encore, dans cette approche, on retrouve le Nombre d’or lié à la vie. »
Extrait du livre de Louis Gross « Formes et nombres sacrés », Diffusion Rosicrucienne