MANIFESTE ROSE-CROIX
Appellatio Fraternitatis Rosae Crucis
« Voici donc les quelques idées que nous souhaitions partager avec vous à travers cet « Appel de la Fraternité des Rose-Croix ». En effet, nous pensons qu’il y a urgence à donner une orientation spiritualiste, humaniste et écologiste à nos comportements individuels et collectifs. Mais s’il y avait une priorité à donner, ce serait l’écologie. En effet, si l’humanité parvient à résoudre durablement les problèmes économiques et sociaux qui se posent à elle, mais si, parallèlement, la Terre est devenue invivable ou difficilement vivable pour la grande majorité de ses habitants, quel intérêt et quel plaisir y aura-t-il à vivre ? Dans ce domaine, ceux et celles qui gouvernent les pays et les nations ont une grande responsabilité, en ce sens qu’ils ont le pouvoir de prendre des décisions et de faire en sorte qu’elles soient appliquées. Mais si les peuples se désintéressent de l’écologie et ne font rien à leur niveau pour préserver la nature, il est évident que la situation ne cessera d’empirer et que les générations futures hériteront d’une planète qui ne sera plus que l’ombre de ce qu’elle était.
En second lieu, et au risque de vous surprendre, c’est l’humanisme et non la spiritualité qui doit être privilégié. Mettre l’être humain au cœur de la vie sociale, dans le respect de la nature, ne peut qu’être un vecteur de bien-être et de bonheur pour tous, sans distinction. Cela suppose de voir en chaque personne une extension de soi-même, au-delà des différences et même des divergences. C’est là une entreprise difficile, car chacun a un ego, lequel tend à le rendre individualiste et l’engage à se préoccuper avant tout de lui-même, de ses proches et des personnes avec lesquelles il a des affinités diverses. Poussée à l’extrême, c’est cette attitude égotiste, voire égoïste, qui est à l’origine des discriminations, ségrégations, divisions, oppositions, exclusions et autres formes de rejet entre individus. À l’opposé, l’humanisme est synonyme de tolérance, de partage, de générosité, d’empathie, en un mot, de fraternité. Il est fondé sur l’idée que tous les êtres humains sont des citoyens du monde.
La nécessité d’être écologiste est relativement évidente lorsque l’on considère l’état de la planète. De même, tout individu suffisamment sensible et intelligent comprend en quoi il est bien d’être humaniste, même s’il ne l’est pas lui-même. En revanche, il n’y a a priori aucune raison objective d’être spiritualiste, d’autant qu’il est impossible de prouver l’existence de l’âme et de Dieu, même au sens que les Rose-Croix Lui donnent. Aussi, bien que la spiritualité nous semble essentielle pour être heureux et donner à la vie toute sa dimension, nous comprenons que l’on puisse être athée. Cela étant, il est pour nous évident que l’univers, la Terre et l’humanité ne doivent rien au hasard et s’inscrivent dans un Plan transcendantal, pour ne pas dire divin. C’est précisément pour cette raison que nous avons la faculté d’étudier la Création et de nous interroger sur le sens profond de l’existence. En cela, nous sommes à la fois des acteurs et des spectateurs de l’Évolution cosmique, telle qu’elle s’exprime dans le cosmos et sur notre planète.
Peut-être êtes-vous écologiste et humaniste, mais pas spiritualiste ? À moins d’être foncièrement matérialiste, cela veut dire qu’à défaut de croire en Dieu, vous avez foi dans la nature et en l’homme, ce qui est à la fois respectable et louable. En cela, nous faisons une distinction entre un matérialiste et un athée. En règle générale, le premier fait des possessions matérielles l’idéal de sa vie, souvent au détriment de la nature et sans se préoccuper des autres. Quant au second, il est la plupart du temps un croyant qui s’ignore ou qui a perdu la foi, au sens religieux du terme. Quoi qu’il en soit, nous pensons que la spiritualité (et non la religiosité) est en elle-même un vecteur d’humanisme et d’écologie, car comme nous l’avons expliqué plus haut, elle est fondée sur la connaissance des lois divines, au sens de lois naturelles, universelles et spirituelles. Or, quiconque recherche cette connaissance, même s’il ne l’a pas encore acquise, est par nature idéaliste.
D’après les anthropologues, l’humanité “moderne” est apparue il y a environ deux cent mille ans. À l’échelle d’une vie humaine, elle peut sembler âgée. Mais au regard de ses cycles d’évolution, elle est dans son adolescence et en montre toutes les caractéristiques : elle est en quête d’identité, se cherche une destinée, fait preuve d’insouciance et même d’inconscience, se croit immortelle, se livre aux excès, défie la raison et bafoue le bon sens. Cette étape évolutive, avec son lot de difficultés, d’épreuves et d’échecs, mais aussi de satisfactions, de réussites et d’espoirs, est un passage obligé qui doit lui permettre de grandir, de mûrir, de s’épanouir et finalement de s’accomplir, c’est-à-dire de se réaliser sur les plans matériel et spirituel. Mais pour cela, elle doit devenir adulte. »